Ni hommes ni femmes, les tida wena
ont longtemps joui d’un statut respecté dans l’ethnie vénézuélienne des
Waraos. L’irruption de la modernité les a toutefois fragilisés, venant
bouleverser des traditions vieilles de 8 500 ans.
- 19 Septembre 2014
© Álvaro Laiz/Parallelozero
Entre autres projets, le photographe espagnol Alvaro Laiz a
développé un intérêt particulier pour les identités transgenres dans les
populations nomades ou indigènes. Cette quête l’a conduit à rencontrer
les Indiens Waraos du Venezuela, un peuple nomade du delta de
l’Orénoque, dans le nord-est du pays. Cette communauté très ancienne
installe ses villages lacustres, composés de huttes en bois de palme,
sur les marécages et se déplace en pirogue. Le mot warao
signifie “maître de la pirogue”. Société matriarcale, l’ethnie warao a
toujours compté en son sein un nombre régulier d’individus transgenres,
les tida wena. Ces derniers, qui sont parfois d’anciennes
épouses d’un conjoint polygame, accomplissent les tâches ménagères et se
chargent de l’éducation des enfants. Les transgenres officient parfois
en tant que chamans. De fait, les Waraos estiment qu’ils possèdent un
“double esprit”, féminin et masculin. Une dualité qui leur facilite
l’accès aux âmes des ancêtres qui rôdent dans la jungle… Historiquement,
les tida wena étaient parfaitement acceptés et respectés par
la communauté. Cela a toutefois commencé à évoluer ces dernières
décennies, à mesure que l’essor de l’exploitation pétrolière et du
tourisme sortaient les Waraos de leur isolement. Sujet d’opprobre
social, le sida a commencé à faire des ravages, et “des populations à risque comme les tida wena et les homosexuels ont souvent été rejetées et accusées d’être responsables de l’épidémie”, commente Alvaro Laiz.
LE PHOTOGRAPHE — Álvaro Laiz