
C’est
au cri de « que les corrompus nous rendent nos terres !» que des
centaines de militant(e)s du Mouvement des Sans Terre ont occupé ce 25
juillet du nord au sud du Brésil de grandes propriétés appartenant à des
ministres, des sénateurs, et directement ou à travers des prête-noms,
au président de facto Michel Temer. A Rio de Janeiro les travailleurs
sans terre ont occupé l’immense hacienda improductive de Ricardo
Texeira, ex-président de la puissante fédération brésilienne de
football, impliqué comme Temer dans de nombreuses affaires de
corruption. L’hacienda Santa Rosa, nous explique Joaquin Pineiro, des
Sans Terre, sert de plate-forme au blanchissement de capitaux,
et « toutes ces terres de corrompus doivent être rendues à la reforme
agraire ». La justice brésilienne a ordonné l’expulsion immédiate, ce 25
juillet, des occupants qui ont décidé de maintenir leur campement.Temer – un ultra-libéral qui s’accroche au pouvoir depuis le coup d’État mené par la droite parlementaire contre la présidente élue Dilma Roussef – est en train de vendre aux multinationales les terres de l’Amazonie appartenant aux communautés indigènes et aux quilombolas (communautés afro-descendantes). Dans le reste du Brésil, il met aux enchères les terres destinées à la réforme agraire (manière d’acheter le vote des secteurs de l’agrobusiness au sein du congrès et de freiner sa possible destitution pour corruption). Allié privilégié des multinationales, le président de facto multiplie la répression contre les militants sociaux. Les travailleurs sans terre dénoncent l’impunité qui entoure les assassinats et autres exactions, réclament la démission du putschiste, la tenue immédiate d’élections libres et la reprise de la réforme agraire.
Au Venezuela, les amis de Temer rêvent, impatients, de mener la même politique sauvage de privatisation de l’économie, de restitution des terres aux grands propriétaires et de répression des mouvements sociaux. Leur violence raciste et de classe (que les médias internationaux déguisent en « révolte populaire » comme ils l’ont fait pour les mobilisations de la droite contre Dilma Roussef) n’est que la répétition générale de ce qu’ils feraient une fois au pouvoir. Depuis le coup d’État contre le président Chavez en 2002 jusqu’à aujourd’hui, en passant par les 43 morts des « guarimbas » de 2014, cette droite est responsable de la violence et de la majorité des morts. Des mouvements paysans ont répondu en occupant des terres improductives appartenant à ces partisans du coup d’État.

La
grande différence avec le Brésil est qu’ici, le gouvernement
bolivarien, malgré ses inerties conservatrices, résiste aux violences de
la droite et continue à donner des réponses positives aux
revendications des paysan(ne)s : ce lundi ; après des années de luttes
amères, d’expulsions à l’aube, l’Institut National des Terres leur a
enfin remis 5.000 hectares du grand domaine Las Mercedes (État de
Barinas) et leur a octroyé le titre de propriété. Comme l’explique le
journaliste Marco Teruggi : « Il faut poursuivre le mouvement avec
d’autres récupérations stratégiques comme les grandes propriétés de
Cajarito El Diamante, La Primavera, El Otoño, celles du Sud du Lac de
Maracaibo, une longue liste de terres encore aux mains de ceux qui,
historiquement, ont vécu de la pauvreté des paysans et financent
aujourd’hui les violences de l’extrême droite putschiste. Manière de
donner un double signal : en direction des grands propriétaires pour les
décourager de continuer à financer la déstabilisation, et en direction
des mouvements sociaux, pour montrer qu’on peut renforcer une dynamique
positive depuis l’État en faveur de ceux qui veulent semer la terre. »
(1)Thierry Deronne, Venezuela, 26 juillet 2017
Note
- Lire, de Marco Teruggi : Campesinos rescatan 5 mil hectáreas de un terrateniente financista de la violencia, http://www.hastaelnocau.wordpress.com/2017/07/25/campesinos-rescatan-5-mil-hectareas-de-un-terrateniente-financista-de-la-violencia